Concevoir sa haie brise-vent

27/12/21

Maraîchage et bocage ferme résiliente et écologique

Le mois dernier, nous avions évoqué différentes façons de protéger sa ferme contre les tempêtes. Parmi ces propositions, il était important de développer le sujet des haies, qui rendent de nombreux services à la ferme au-delà de la simple protection au vent.

Elles servent de refuge aux oiseaux et insectes, qui peuvent être très précieux en tant qu’alliés pour la culture. Elles peuvent aussi servir à bloquer les vents asséchants estivaux, protéger les fruitiers du gel, limiter l’impact des embruns en bord de mer et l’érosion éolienne, temporiser l’avancée du feu dans les zones exposées, filtrer la venue de grands herbivores au jardin, … Bien des avantages, en somme. De natures différentes, ces haies constitueront, après choix, un lieu de vie, mais aussi de ressources et de régulation.

Entre les années 1960 et 1990, les grands remembrements ont achevé de diminuer la surface du réseau bocager. L’économie d’échelle a anéanti tout un travail séculaire. Les barbelés et autres fils électriques ont remplacé cette solution écologique. Mais en maraîchage, on observe un retour de l’implantation des haies, notamment pour cloisonner en bio, quand la parcelle voisine ne l’est pas …

Différents types de haies

 

Le bocage, invention fondamentale

 

Le bocage s’est fortement développé durant le Moyen-âge, surtout dans des pays comme la Belgique, l’Autriche, l’Italie. En France, il est caractéristique du Nord-Ouest, du Nord, du Centre et de certaines parties de l’Anjou. Il reste par exemple utilisé et entretenu dans l’Avesnois ou le Boulonnais, encore aujourd’hui. De construction plus récente (XIXe siècle) dans l’Avesnois, il est constitué d’aubépine et de saules têtards. Il servait surtout à délimiter les parcelles de bétail, qu’il nourrissait ou abritait, d’ailleurs, parfois. Les bocages offrent donc une protection contre le vent, une biodiversité et une disponibilité en bois.

Idée des essences pour une haie bocagère : ajonc d’Europe, aulne glutineux, bouleau verruqueux, charme, chêne, cornouiller sanguin, érable champêtre, frêne commun, hêtre, houx if, néflier, noisetier sauvage, noyer, poirier, pommier, prunellier, saules, sorbier des oiseleurs, sureau noir, troène sauvage…

 

La haie libre

 

Constituée d’essences variées, elle convient aux grands espaces. En effet, on ne va pas intervenir dessus. Elle sera donc parfaite pour un lieu permacole où on aura tendance à laisser pousser arbres et arbustes dans leur dynamique propre.

Idée des essences en haie libre : pour la plupart, les essences qui se développent naturellement dans la région.

La haie vive

 

Elle est constituée principalement d’épineux, destinés à dissuader les grands mammifères de passer. On peut même tresser les tiges des arbustes, pour renforcer le maillage. Elle n’est pas véritablement à tailler, donc n’apportera que peu de bois d’œuvre, mais favorisera la biodiversité.

Idée des essences en haie vive : citronnier épineux, épine-vinette, houx, olivier de Bohême, poivrier du Sichuan, prunellier, rosier des chiens, ronce… Le tout sera de s’inspirer de ce que la nature apporte spontanément.

 

La haie sèche

 

Réalisée avec des végétaux morts, elle est enserrée entre des piquets enfoncés dans le sol. La méthode est de recycler tous les branchages qu’on peut en les superposant. C’est une manière de recycler ce qu’on a abattu. Cela fournit un refuge à de nombreux animaux, oiseaux, rongeurs tels les hérissons et insectes, tout en luttant contre l’érosion. Autre avantage : elle peut être vite mise en place et l’agriculteur.rice peut donc plus rapidement profiter de ses bienfaits contre le vent. Enfin, il s’agit d’une remarquable pépinière, car les graines laissées tombées par les volatiles pourront s’y épanouir.

Bien entendu, ces classifications n’enlèvent en rien la possibilité de tout entremêler, à la façon d’une haie plessée ! (Le plessage des haies réside dans le pliage des branches pour les tresser, afin de constituer une clôture vivante.)

Concevoir une haie efficace contre le vent

 

Pour être efficace, la haie brise-vent doit être la plus perpendiculaire possible au sens du vent, la plus haute possible (mais composée d’essences de hauteur différentes), et assez dense. Pour une protection toute l’année, l’idéal est d’implanter une majorité d’arbres et d’arbustes persistants.

Il faut bien sûr sélectionner des espèces résistantes ou tolérantes au vent. Mais également des espèces qui ne bloquent pas trop le vent. L’idée est plutôt de filtrer le vent pour diminuer sa vitesse plutôt que de le bloquer, ce qui engendrerait de nombreuses perturbations sur les côtés de la haie. D’autant qu’un vent léger permet aussi d’éviter le gel. Sa largeur devra aussi être supérieure à celle que l’on souhaite protéger, car le vent a cette fâcheuse tendance à contourner les obstacles…

Au niveau des essences, on peut en profiter pour choisir des végétaux qui pourront apporter bois, fruits, fixation d’azote, refuge pour les auxiliaires, etc. En revanche, il faudra être vigilant concernant les arbres gourmands en eau (peuplier, saule, …) qui pourraient concurrencer les récoltes les plus proches. Au contraire, il est bon d’orienter les eaux de ruissellement en direction de la haie pour venir l’irriguer naturellement.

Il est aussi très important de penser à la hauteur qu’atteindront vos arbres et arbustes à l’âge adulte. Face au vent, on plantera des arbustes résistants et bas. C’est par exemple le cas des espèces dites pionnières (genêts, ajoncs, genévriers, argousier, cornouiller, laurier, houx, aubépine…). Le deuxième rang sera constitué de petits arbres, type fruitiers, puis des arbres supérieurs à 15 m (merisiers, robiniers, acacias, frênes…), et enfin les grands arbres : chênes, conifères, châtaigniers, hêtres,…).

Se faire accompagner

 

Certains programmes régionaux, tels que Breizh Bocage, ont pour objectif l’amélioration du maillage bocager sur leur territoire. Ce genre de dispositif vise à soutenir des investissements pour des travaux de plantation et de dégagement des plants pendant une durée maximum de 3 ans après plantation. Les institutions locales accompagnent aussi, de plus en plus, ce mouvement populaire de nouvelle transition écologique. Par exemple, la communauté de communes Portes de Loire accompagne les agriculteur.rice.s, particuliers ou communes vers une rénovation voire une création de haies bocagères. Les frais de travaux sont financés par l’UE, à travers le Fonds européen agricole pour le Développement rural (FEADER). Ils ont permis la restauration ou la création de 130 km de haies pour environ 240 entités bénéficiaires, sur une quinzaine de communes, en 7 ans.

Et les associations sont aussi bien présentes. Ainsi, depuis 2008, l’association costarmoricaine Terres et bocages œuvre « pour qu’une culture bocagère fasse encore partie du métier agricole. » Mission bocage, dans les Meauges et le Choletais, a commencé, voici 30 ans, par réaliser un état des lieux des bocages existants sur ces territoires. De fil en aiguille, et suivant des demandes formulées par des agriculteurs et agricultrices, l’association commencé à mettre en place des replantations de haies. Un service technique s’est développé, puis les collectivités locales se sont greffées à tout cela. L’association a planté plus de 1 000 000 d’arbres et contribue fortement à cet aspect sur tout le territoire.

Article rédigé par Florian Vandaele et Valériane Eulry - Le 27 décembre 2021

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